Où va l'immobilier face à la crise du virus? Le groupe français Icade donne quelques pistes car il joue non seulement sur des terrains classiques, logements et bureaux, mais occupe aussi une niche d'actualité, les cliniques et maisons de retraite.
La crise "fait un trou d'air en 2020 mais l'effet dans le temps sera assez limité", a assuré à l'AFP Olivier Wigniolle, directeur général d'Icade, à l'occasion des résultats semestriels mardi.
Son bénéfice net semestriel a chuté de 89%, par rapport à un an plus tôt, à cinq millions d'euros. Le "cash-flow net courant", plus représentatif des performances, a reculé de 7,8% à 161,3 millions d'euros, et les revenus de 8,3% à 622 millions.
Sur toute l'année, Icade estime que la crise privera ses résultats d'une centaine de millions d'euros, mais espère en récupérer presque la moitié en 2021.
Ces chiffres dressent des perspectives pour l'ensemble du secteur immobilier au-delà de la seule situation du groupe, au capital dominé par le public via la Caisse des dépôts.
En effet, Icade joue sur de multiples tableaux. Il fait construire des logements, loue des bureaux et possède des établissements de santé, essentiellement des cliniques et maisons de retraite.
Le groupe accélère depuis plusieurs années dans cette dernière activité.
"On ne savait évidemment pas que le Covid allait arriver", a souligné M. Wigniolle. "Mais à rebours, ça valide cette stratégie. L'immobilier de santé, on va en avoir plus besoin demain qu'hier."
Le patron d'Icade évoque notamment le "Ségur de la santé". Lancées en pleine épidémie, ces négociations entre gouvernement et monde de la santé viennent d'aboutir à la promesse de vastes investissements.
Signe qu'Icade croit toujours beaucoup à la santé, et pas seulement en France, le groupe a annoncé mardi l'achat pour 145 millions d'euros de maisons de retraite, largement situées en Allemagne, au groupe Orpéa qui continuera à les exploiter.
Sur le même modèle, "peut-être verrons-nous les hôpitaux publics externaliser (vendre) une partie de leurs murs, même s'il est trop tôt pour le dire", a avancé M. Wigniolle.
- Le logement rebondit -
L'immobilier de santé, est une niche, mais les résultats d'Icade donnent d'autres indications sur un univers beaucoup plus vaste, le logement. Elles sont plutôt rassurantes, dans la lignée de chiffres déjà donnés par un grand concurrent, le promoteur Kaufman & Broad, début juillet.
Les revenus ont certes chuté face à l'interruption de nombreux chantiers lors du strict confinement contre le virus au printemps. Mais les réservations, gage de futures rentrées d'argent, ont fortement rebondi dès le déconfinement.
"Objectivement, ce n'était pas le pronostic que nous faisions", s'est félicité M. Wigniolle, estimant que le confinement fait émerger une "aspiration à un logement de meilleure qualité".
Néanmoins, plus que les particuliers, ce sont les grands investisseurs qui ont soutenu les ventes et les dominent désormais. Leurs réservations ont doublé par rapport à un an plus tôt.
"C'est une classe d'actifs qui leur semble assez intéressante dans le contexte actuel", a remarqué M. Wigniolle, évoquant un "niveau de risque extrêmement limité".
A ce titre, Icade a annoncé une énorme vente - 1.000 logements - à la filiale de logements de la Caisse des dépôts, CDC Habitat.
Certes, la transaction se fait en famille, vu les liens entre Icade et la Caisse, mais elle n'est pas isolée. Kaufman & Broad avait aussi souligné l'immense appétit de CDC Habitat qui a promis de financer des dizaines de milliers de nouveaux logements face à la crise.
Reste le cas des bureaux. La crise va-t-elle se traduire par la faillite de multiples locataires, entraînant une déprime générale de l'immobilier d'entreprise?
Icade n'observe pas de défaillances en série, mais a renoncé à percevoir plusieurs mois de loyers auprès des plus petites entreprises, de l'argent qu'il ne récupérera jamais.
Quant aux bureaux eux-mêmes, vont-ils devoir changer de visage alors qu'entreprises et employés se sont - parfois difficilement - habitués au travail à domicile?
"Je ne sais pas si le travail dans les immeubles de bureaux va être très affecté par la crise", a éludé M. Wigniolle. "On n'en est pas encore là."
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Paris, 21 juil 2020 (AFP) - © 2020 AFP